PORTRAITS

Aliénor d'Aquitaine, princesse des lettres occitanes
Auteur :  CIRDÒC-Mediatèca occitana
Aliénor d'Aquitaine, princesse des lettres occitanes
Auteur :  CIRDÒC-Mediatèca occitana
La duchesse Aliénor d’Aquitaine (vers 1124 -1204) est passée dans la légende pour son destin hors du commun, devenant successivement reine de France et reine d’Angleterre. Elle a été l’objet privilégié des poètes et écrivains de son temps, tantôt partisans, tantôt hostiles, qui nous transmettent deux portraits très différents de la grande dame du XIIe siècle : une « légende noire », celle d’une femme légère et avide de pouvoir, et une « légende dorée », celle d’une princesse brillante, incarnation de la Dame idéalisée des troubadours.

À l’âge de 14 ans, Aliénor hérite d'un des plus importants domaines de l’Europe occidentale, qui s’étend des Pyrénées jusqu’à la Loire. Elle épouse en 1137 l’héritier du royaume de France, le futur Louis VII, et devient reine à ses côtés. Leur mariage est annulé par l'Église quinze ans plus tard, en 1152. Elle épouse alors Henri Plantagenêt, puissant seigneur de la Normandie et de l’Anjou, qui devient roi d’Angleterre deux ans plus tard. Le couple Plantagenêt règne ainsi sur tout l’Ouest du royaume de France et sur le royaume d’Angleterre. Le règne d’Henri Plantagenêt et d’Aliénor va connaître un véritable âge d’or culturel marqué notamment par l’apogée de l’art des troubadours.

Aliénor et les troubadours : mythe ou réalité ?


Aliénor est l’héritière d’une des cours les plus novatrices sur le plan artistique. Son grand-père, Guilhem IX, est le premier troubadour connu et considéré comme le principal inventeur de cet art nouveau qu’est le trobar. Son père Guilhem X est un grand mécène et reçoit de nombreux troubadours comme Cercamon ou le jeune Marcabru.
Devenue reine de France, certains récits dépeignent Aliénor comme une souveraine qui détonne par ses goûts et ses protections artistiques au sein d’une cour moins libérale dans sa conception du désir et de l’amour. Le troubadour Marcabru aurait par exemple été banni de la cour par le roi qui n’aurait toléré le chant d’amour dont la reine était naturellement l’objet privilégié.

S’il est difficile de démêler la vérité historique de la légende, il est certain que Bernat de Ventadorn, qui la nomme explicitement dans une de ses chansons, a été un des grands protégés des cours d’Aquitaine et d’Angleterre. Il est également révélateur que l’âge d’or du trobar occitan se situe au moment du règne d’Aliénor et d’Henri Plantagenêt.

Le couple Plantagenêt et les arts


Quelle que soit la réalité du rôle d’Aliénor dans l’apogée de l’art occitan du chant d’amour dans la seconde moitié du XIIe siècle, le règne du couple Plantagenêt représenta indéniablement un âge d’or culturel. Leurs domaines, au croisement des civilisations d’oc, d’oïl et bretonne, vit éclore et se développer toutes les innovations majeures de la littérature occidentale du XIIe siècle, le roman arturien, la lyrique occitane ou encore l’épopée.

Aliénor d'Aquitaine s'éteint à près de 80 ans à Poitiers en 1204. Sa sépulture à l’abbaye de Fontevraud est surmontée d’un gisant la représentant un livre à la main, dernière innovation que l’on doit à un personnage digne de sa légende.